Le Monde, le 15 novembre 2022:
Si la prise de conscience concernant les discriminations sexuelles, raciales, celles dues à l’âge, au handicap, à l’identité de genre ou à l’orientation sexuelle progresse dans nos sociétés, la discrimination pour précarité sociale demeure méconnue, estime Olivier De Schutter, rapporteur spécial de l’ONU sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté, dans une tribune au « Monde ».
En Belgique, Johan me raconte : « Dès qu’ils savent d’où vous venez, c’est terminé. Ils ne regardent même pas votre lettre de motivation. » L’homme d’une cinquantaine d’années sait que les employeurs écartent ses candidatures dès le moment où l’adresse figurant sur son CV leur indique la localité d’où il vient. « Des journalistes sont venus ici et la façon dont ils ont présenté notre quartier lui a donné mauvaise réputation. Les employeurs nous ferment la porte au nez, sans explication. » D’autres personnes comme Johan se joignent à la conversation et rapportent des expériences similaires ou acquiescent en silence.
Les vécus de ces personnes – les attitudes de mépris, les remarques condescendantes des travailleurs sociaux et des médecins, la méfiance exprimée par les propriétaires ou les employeurs – sont autant d’exemples de discriminations pour précarité sociale. Ces attitudes et ces comportements négatifs à l’égard des personnes en situation de pauvreté font partie de leur expérience quotidienne. Elles empêchent celles-ci de pleinement exercer leurs droits, qu’il s’agisse d’accéder aux soins de santé, de louer un appartement ou de trouver un emploi.